PASSAGE A LA NOUVELLE RÉPUBLIQUE

17 juin 2020 Par Brahim TAZAGHART

1) La libération des détenus du Hirak est une condition irréfutable pour l’ouverture d’un débat sérieux sur la constitution et l’élaboration d’un agenda politique de passage à la nouvelle république. Cela doit être clairement exprimé et explicité pour éviter toute reproduction des erreurs du passé. Il est clair, en effet, qu’on ne peut débattre librement d’une proposition politique présenté par le pouvoir, en toute liberté et en toute conscience, lorsque dans les prisons du pays des militants croupissent pour avoir exprimé des opinions ou des déclarations politiques jugées subversives. Le maintien en prison de ces détenus donne un cachet autoritaire à toute initiative quelle que soit sa qualité et lui enlève toute crédibilité.

2) La constitution de la nouvelle république ne doit pas précéder les consensus sur les fondamentaux et autres consensus vitaux qui doivent se dégager. Elle doit leur donner corps, force juridique et légitimité politique. Si nous admettons toutes et tous que celle-ci doit émaner d’une institution parlementaire à pouvoir constituant, il est nécessaire de procéder à l’ouverture d’un dialogue sérieux avec la classe politique et la société civile, dans la transparence la plus totale. C’est le moyen le meilleur pour faire évoluer la situation et briser le statu quo ambiant.

3) Il est plus qu’indispensable de commencer par la réouverture du champ médiatique avec un cahier de charge discuté et accepté par les professionnels des médias mais aussi, par les élites politiques, intellectuelles et universitaires. La liberté d’expression n’est pas un label, elle consiste à donner la parole à toute les voix qui portent et non pas seulement à celles proches des thèses développées par les uns et les autres des forces concessives et financières. Il s’agit de sortir du cadre de la propagande qui domine actuellement le champs de l’information vers la construction intelligente d’une opinion publique apte au décernement et aux jugements rationnels.

4) La refondation du champs politique doit avoir comme ambitions le renouvellement de la classe politique et une réorientation stratégique de ses missions. Née d’une vision qui consistait à faire du multipartisme un moyen de re-légitimation du régime en place et de la prolongation de sa vie par le moyen d’arrangements qui ont conduit à une bipolarisation criminelle de la scène politique avec a eu comme conséquence 200 000 morts, cette société partisane doit s’amender profondément ou disparaître. De nouvelles entités doivent voir le jour pour apporter de la vitalité à un champs politique dominé par les conditionnements et l’autocensure.

5) Le monde entame une période de perturbations notables. A cet effet, la situation nationale et internationale exigent un nouveau paradigme. Pour éviter de subir, sans capacités réelles de faire face, nous devons nous accepter en tant qu’algériens, faire évoluer le pays ensemble, sans qu’aucune partie n’impose sa logique, ni ne dicte sa seule vision aux autres. Le peuple a démontré de la façon la plus éclatante sa maturité pour que les institutions de l’Etat, l’opposition, la société civile et les faiseurs d’opinions œuvrent à doter le pays d’un model de gouvernance qui assurent l’implication de tous au bonheur de tout un chacun. La sécurité du pays et sa souveraineté s’y rattachent et dépendent.

6) La transition politique se fera avec des institutions dynamiques, en plein fonctionnement. Dans ce sens, le président de la république a, devant lui, la chance de marquer l’histoire du pays en faisant de son mandat présidentiel un mandat de transition effective vers la nouvelle république. Le président doit arracher la confiance du peuple pas les actes et non pas seulement par les déclarations. Il a la charge de briser le statu quo actuel et de mettre l’espoir dans le mouvement vers la mise en place d’un système politique ouvert.

Brahim TAZAGHART